La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (dite loi Agec) prévoit la fin des emballages en plastique à usage unique en France d’ici 2040 et une proposition de règlement européen prévoit d’aller encore plus loin en la matière. Les entreprises agroalimentaires, grandes utilisatrices d’emballages, sont concernées au premier chef par ces évolutions. Pour accompagner ce secteur d’activité, très présent dans les Pays de la Loire, le Technocampus Alimentation et ses partenaires décryptent ces nouvelles mesures avec David Buhé, membre de la commission Environnement de l’Union Européenne et Sylvie Moison, directrice générale du réseau Ligépack, spécialisé dans les emballages alimentaires.
Vers une économie circulaire des emballages
Chaque Européen génère 180 kg d’emballages par an. Si rien n’est fait, ce chiffre risque de progresser de 19 % d’ici 2030 par rapport à 2018, année de référence. Pour le plastique, la progression est encore supérieure, avec de lourdes conséquences sur l’environnement. Les lois AGEC et Climat et Résilience promulguées respectivement en février 2020 et août 2021 visent à enrayer cette tendance. Elles devraient être renforcées par un règlement (et non plus une simple directive) de la commission européenne, dont la proposition initiale a été publiée le 30 novembre 2022. Destinée à mettre en place une économie circulaire des emballages, cette proposition privilégie une approche fondée sur la prévention, le recyclage restant une solution finale. Ce changement de paradigme part du constat que la croissance des déchets (19 %) est supérieure à celle du recyclage (6%). Dans ce contexte, la proposition de règlement européen prévoit des mesures concrètes qui complètent ou renforcent la loi AGEC.
Une enquête pour identifier les besoins des entreprises
Dans le cadre de la loi AGEC, les objectifs nationaux de réduction, de réutilisation, de réemploi et de recyclage sont fixés par décret par période de cinq ans. Le premier décret 3R, pour Réduire-Réutiliser-Recycler, couvrant la période 2021-2025, a été publié le 30 avril 2021. La Région des Pays de la Loire, le Technocampus Alimentation et ses partenaires (Ligepack, Ligeriaa, Valorial, Végépolys Valley, CTCPA, et la Draaf des Pays de la Loire) ont souhaité connaître les besoins des entreprises agroalimentaires pour les accompagner dans la nécessaire adaptation de leurs emballages au nouvel environnement réglementaire. Une enquête menée en 2022 a permis d’identifier 5 besoins prioritaires :
- Mieux connaître pour mieux appliquer la réglementation et ses évolutions.
- Trouver des fournisseurs, notamment locaux, et connaître leurs solutions.
- Mieux comprendre les compositions et les fonctionnalités des différents emballages.
- Intégrer les dimensions process et travailler avec les équipementiers.
- Prendre en compte les enjeux environnementaux dans leur globalité en intégrant l’ensemble de la filière.
En réponse au premier point, voici une revue des mesures concrètes prises et à venir.
Réduire les déchets d’emballage
. La loi Agec fixe un objectif de 20% de réduction des emballages plastiques à usage unique d’ici fin 2025, dont au minimum la moitié par recours au réemploi et à la réutilisation.
Cet objectif est complété par celui de tendre vers une réduction de 100% des emballages en plastique à usage unique « inutiles » d’ici la fin 2025.
. Enfin, une filière de recyclage opérationnelle pour tous les emballages en plastique à usage unique doit être mise en place d’ici au 1er janvier 2025.
. La proposition de règlement européen prévoit, pour sa part, une réduction des déchets d’emballage de 5% d’ici 2030 et de 15% d’ici 2040 par rapport à 2018. L’objectif est de parvenir à une réduction globale des déchets d’environ 37% par rapport à leur niveau, en l’absence de nouvelles mesures.
Favoriser la réutilisation et la recharge des emballages
. La loi AGEC interdit les emballages à usage unique pour la restauration sur place dès lors qu’elle a une capacité de 20 couverts et -sauf exception- pour les fruits et légumes conditionnés dans des emballages de moins d’1.5 kg
. L’obligation européenne ira globalement dans le même sens en supprimant la limite de 20 couverts et en permettant le maintien d’emballages plastiques à usage unique s’ils permettent la distinction entre produits bio et non bio – des précisions seront apportées ultérieurement.
Par ailleurs AGEC, (Climat et Résilience) et PPWR s’entendent globalement pour pousser le recours au vrac avec un taux de 20% de la surface commerciale et inciter le consommateur à apporter ses propres emballages pour la vente à emporter.
Lutter contre les emballages inutiles
Si la Loi AGEC prévoit la suppression des emballages inutiles sans autre précision, le PPWR définit beaucoup plus clairement cette notion en instaurant des critères de fonctionnalité de l’emballage qui devront être étayés par des tests, essais, normes prouvées à travers des déclarations de conformité. Par ailleurs, il sera demandé de respecter un taux de vide de maximum 50%.
Rendre les emballages plastiques entièrement recyclables d’ici 2025
en favorisant le développement de nouvelles filières au point d’envisager la suppression de nos emballages en polystyrène ou polystyrène expansé, tel était l’objectif fixé par la France et qui a permis le regroupement d’industriels pour trouver de nouvelles solutions.
Le PPWR quant à lui prévoit notamment des critères d’écoconception, de séparabilité des composants, pour ne pas entraver le tri des emballages et surtout, permettre d’obtenir une qualité de matière issue du recyclage suffisamment élevée pour se substituer à la résine vierge d’ici 2030.
Ces exigences de recyclabilité s’appliqueront bien sûr à tous les emballages, qu’ils soient à usage unique ou réemployables.
Augmenter la part de recyclé dans les emballages
Si la France se contentait d’appliquer les exigences de la Directive SUP avec un taux minimal de 25% de recyclé d’ici 2025 et de 30% en 2030 pour les bouteilles en PET, le PPWR va beaucoup plus loin en prévoyant des taux de plastique recyclé distincts en fonction de sa résine et de son application (contact alimentaire ou pas) pour tout emballage plastique ou composante d’emballage dès lors qu’elle représente plus de 5% en poids de l’UVC.
REP Emballages élargie
Les metteurs sur le marché doivent atteindre ces objectifs via leurs éco-organismes agréés en fonction des REP (Responsabilité Elargie aux Producteurs) et le principe du « Pollueur Payeur ».
En France, si la REP emballages ménagers et consommés hors foyers existe depuis longtemps, deux nouvelles REP apparaissent avec la REP emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les professionnels de la restauration depuis le 1er janvier 2024 et à partir du 1er janvier 2025, une extension aux emballages consommés ou utilisés par les professionnels.
Ces extensions de REP sont en parfaite cohérence avec le PPWR dont les objectifs et obligations s’appliqueront à tous les emballages, quels que soient les matériaux utilisés, le secteur d’activité les mettant sur le marché, obligeant les entreprises à reconsidérer l’ensemble de leurs emballages et non pas seulement les unités vente consommateurs.
Simplifier le tri
via une harmonisation des règles de tri des emballages ménagers. Récemment modifiées dans le cadre de la loi AGEC, elle sera de nouveau revue avec le déploiement d’un autre étiquetage harmonisé au sein l’Union Européenne pour l’ensemble des emballages ménagers, qu’ils soient à usage unique ou réemployable.
Les nouvelles exigences environnementales auxquelles sont soumis les emballages constituent un défi à relever pour toute la chaîne de valeur de la filière agroalimentaire. Le Technocampus Alimentation se tient aux côtés des entreprises en mettant à leur disposition ses expertises et ses ressources.
Vous pouvez revoir le replay du webinaire de la version initiale du PPWR organisé en février 2023 par le Technocampus Alimentation et Ligépack qui portait sur « Évolutions réglementaires environnementales : Quelles conséquences pour vos emballages ? » 👉 sur le site du Technocampus Alimentation
Paru en Juillet 2024